Un Amour Impossible

Un film de Catherine Corsini (2018) avec Virginie Efira et Niels Schneider

Dans la France des Trente Glorieuses, Rachel (Virginie Efira), d’origine modeste, se bat pour que Philippe (Niels Schneider), issu de la bourgeoisie, reconnaisse leur fille... De la passion inaugurale à la révélation de l’indicible, une fresque bouleversante de Catherine Corsini, adaptée de l’autofiction éponyme de Christine Angot.
 

 
À la fin des années 1950 à Châteauroux, Rachel Steiner, secrétaire à la Sécurité sociale, d’origine juive et modeste, rencontre Philippe Arnold, un fils de bonne famille officiant comme traducteur. Leur passion lui ouvre les portes d’un nouveau monde, entre plaisirs charnels, nourritures intellectuelles et escapades bucoliques. Lorsque la jeune femme met au monde la petite Chantal, Philippe, qui exclut de se marier en dehors de sa classe sociale, refuse de la reconnaître. Au fil des années, Rachel s’efforce pourtant d’entretenir le lien avec son ancien amant. Après une longue lutte, elle obtient de Philippe qu’il s’implique dans l’éducation de sa fille et qu’il lui donne son nom. Mais Chantal, désormais âgée de 14 ans, revient de plus en plus triste et agressive de ses visites chez son père…

Émancipation et oppression

Après L’inceste, roman choc paru en 1999, Christine Angot remontait aux origines de la tragédie familiale dans Un amour impossible (Flammarion, 2015), autofiction explorant l’histoire de ses parents et sa relation à celle qui lui a donné la vie. La cinéaste Catherine Corsini (La belle saison) s’empare de ce récit avec pudeur, au travers d’une ample fresque au classicisme délicat, racontée par la voix de Chantal/Christine (incarnée successivement par Estelle Lescure et Jehnny Beth). Dans une France en mutation minutieusement reconstituée, Rachel, amoureuse discrètement humiliée – les réflexions de Philippe laissant poindre son mépris social comme son antisémitisme –, se mue en mère célibataire attentionnée et combative (elle accédera à un poste de manager), jusqu’à la révélation de l’horreur, qui la plonge dans une culpabilité muette sur laquelle se fracassera sa relation avec sa fille. Au fil de ces quatre décennies, qui se referment sur une lumineuse réconciliation, la réalisatrice compose un mélo d’une remarquable subtilité, servi par le jeu trouble de Niels Schneider et la partition bouleversante de Virginie Efira.