Zazie dans le métro

Un film de Louis Malle (1960) avec Catherine Demongeot et Philippe Noiret

En digne héritier de Chaplin et de Tati, Louis Malle transpose avec bonheur à l’écran la verve et la poésie de Queneau et invente le double de cinéma d’une grande héroïne de la littérature.
 

 
Dans la cohue d’une gare parisienne, Gabriel attend sa nièce Zazie. Sa sœur s'étant entichée d'un Jules dans la capitale, elle vient retrouver ce dernier et confie la gamine au tonton, vu qu'avec lui “la petite ne risque rien”. L’ami Charles est venu les chercher avec son “tac’”, car le métropolitain est en grève. Problème. Pour Zazie, sans le métro, Paris n’a strictement aucun intérêt. Dans une réplique devenue immortelle, elle ne l’envoie pas dire au tonton Gabriel qui propose de lui faire voir le vrai tombeau du vrai Napoléon…

“Napoléon, mon c… !”

Passage Choiseul, escaliers de la butte, escapade sur les toits... : dans un Paris qui n'existe presque plus, le film vole, dévale et cavale aux trousses de l’infortuné Gabriel (Philippe Noiret, impeccable), lui-même attaché au sillage, copieusement ponctué de gros mots, de sa nièce édentée. Avec sa coupe au bol et sa jupe plissée, qu’elle va bientôt troquer pour une paire fort convoitée de “bloundjinnzes”, la craquante Catherine Demongeot, du haut de ses 10 ans, a donné un visage inoubliable à l’une des grandes héroïnes de la littérature française, au milieu d’une pléiade de seconds rôles savoureux : l’inquiétant Pédro-Surplus, alias Trouscaillon et Aroun Arachide réunis, le flegmatique Charles et son éternelle promise Mado P’tits pieds, Turandot le limonadier las et Laverdure, son perroquet narquois, la veuve Mouaque toute de mauve vêtue et le bus des touristes fanatisés, prêts à tout pour voir la Sainte-Chapelle… Adapter à l’écran la verve et la poésie du roman de Queneau tenait de la gageure. Louis Malle y parvient avec brio, dans la lignée burlesque de Tati et Chaplin, en transposant l’inventivité loufoque du texte par de brusques accélérations de l’action et une série de gags visuels. "Allezyvouar" !