Vu d’Allemagne :
L’horloge tourne
Podcast : 02.03.2021 13h14
Dans le nouvel épisode de Podcast de NDR Info, le virologue Christian Drostense prononce en faveur de l'utilisation de structures médicales éprouvées lors des vaccinations : médecins de famille et de l'entreprise.
Drosten s'entretient avec Korinna Hennig, rédactrice scientifique de NDR Info, sur la manière dont le taux de vaccination en Allemagne pourrait être augmenté dès que suffisamment de vaccins seront disponibles. Le responsable de la virologie de l’hôpital de la Charité à Berlin dit qu'il ne faut pas s'attendre à ce que plus de soleil et de chaleur affaiblissent considérablement le taux d'infection. Il examine de nouvelles données sur l'efficacité des vaccinations. Et il compare le variant britannique à celui du variant sud-africain du virus.
L'audio du podcast original
Le transcrit du podcast original en allemand
Les liens directs vers les principaux sujets de l'épisode :
- Le variant du virus britannique B.1.1.7 peut-il encore être arrêté en Allemagne ?
- Que dit le modèle de prévision DIVI sur les conséquences d'un assouplissement de grande ampleur ?
- Le délai entre deux doses de vaccination doit-elle être maximisée ?
- Y aura-t-il un effet saisonnier dans le processus d'infection : plus de chaleur = moins de nouvelles infections ?
- Quels problèmes y a-t-il concernant la logistique de la vaccination en Allemagne ?
- Que disent les données des études actuelles sur l'efficacité des vaccins en Écosse, en Angleterre et en Israël ?
- La hiérarchisation dans la stratégie de vaccination doit-elle être ajustée ?
- Quel rôle les médecins de famille et d'entreprise peuvent-ils jouer dans la vaccination ?
- Quelle influence les quantités de livraison plus importantes attendues auront-elles sur les plans de vaccination au deuxième trimestre ?
- Que dit une pré-impression de l'Imperial College de Londres sur la transférabilité du variant B.1.1.7 du virus ?
- Quelle est la signification du site de clivage de la furine dans le SRAS-CoV-2 ?
- Les données de laboratoire montrent-elles une charge virale plus élevée en B.1.1.7 ?
- Les variants B.1.1.7. et B.1.3.5.1 diminuent-ils la réponse immunitaire du corps ?
- Dans quelle mesure les nouveaux variants de virus, par exemple de New York ou de Californie, sont-ils dangereux ?
- Les vaccins vectoriels peuvent-ils modifier le génome humain ?
- Les vaccinations fonctionnent-elles également comme une thérapie des longs covids ?
Korinna Hennig : Jardinerie, coiffeurs, écoles primaires et garderies, cela semble un peu fragmentaire, mais cela indique une direction qui devrait au moins être envisagée d'un point de vue épidémiologique. Il existe des simulations qui indiquent que si toutes les mesures restent telles qu'elles étaient la semaine dernière, c'est-à-dire sans ces ouvertures, l'incidence sera alors d'environ 100 en un mois. Si vous incluez maintenant ce relâchement, vous devrez prendre des contre-mesures ailleurs, c'est ce que vous avez dit récemment dans un podcast, Monsieur Drosten. Le mutant B.1.1.7 plus facilement transférable peut-il encore être arrêté en Allemagne ?
Christian Drosten : Eh bien, proportionnellement, il est imparable. C'est clair. Nous obtiendrons également de nouveaux chiffres des laboratoires. Je suppose que nous verrons qu’environ la moitié des virus sont le mutant 1.1.7. Pour les autres, ce sera moins. Je suppose que nous sommes dans la région d'un pour cent pour le mutant d'Afrique du Sud, qui est plus un vrai mutant de fuite immunitaire. Et avec le mutant brésilien, nous continuerons à pouvoir compter les cas individuels.
Hennig : Vous venez de dire qu’on ne peut plus arrêter le variant anglais B.1.1.7 dans le cadre du processus d'infection. Ensuite, j'entends un "mais".
Drosten : Le fait est qu'à l'heure actuelle, nous avons des mesures d'intervention non pharmaceutiques qui sont à juste titre remises en question pour des raisons sociétales. C'est un compromis politique qu'il faut trouver ici. Je ne peux commenter cela que d'un point de vue scientifique. La proportion augmentera. C'est inévitable. On sait aussi que ce variant britannique est généralement plus répandu. Nous pouvons faire une comparaison qualitative entre l'Angleterre et nous. En Angleterre, la proportion de ce variant anglais est désormais pratiquement complètement saturé. C'est en principe maintenant une épidémie avec ce variant anglais. De petites quantités d'autres variants peuvent bien sûr également y être détectés. Mais c'est une domination totale, toutefois l’incidence, elle, chute là aussi. Cependant, les mesures en Angleterre sont tout simplement plus fortes qu'ici. Il faut le préciser. Les écoles seront désormais partiellement rouvertes en Angleterre. Là aussi, c'est un compromis pour des objectifs politiques. On verra que l'incidence augmentera à nouveau en Angleterre aussi. Il en sera de même pour nous si des mesures sont prises. Mais il est justifié de prendre de telles mesures, comme je l’ai dit, pour des raisons sociales et économiques. Il vous suffit de dire de manière tout à fait neutre ce qui se passera alors. Il arrivera que l'incidence augmente à nouveau. Et la question est donc de savoir que faire pour contrer cela. C'est facile là-bas, car pour le moment, les mesures en Angleterre en termes de réduction générale des contacts sont clairement plus fortes. Il y a une ordonnance de séjour à la maison obligatoire là-bas. Vous devez avoir des raisons plausibles si vous souhaitez quitter la maison. Et nous savons tous que ce n'est pas le cas chez nous. Voilà donc la différence.
Hennig: Et le taux de vaccination est différent en Grande-Bretagne.
Drosten: En effet. C'est l'autre argument, sur lequel on insiste en Angleterre. La situation a en Angleterre est spéciale, en ce sens que les comités de recommandation et les autorités de réglementation sont indépendants l’un de l’autre. Chez nous aussi il y a cette distinction. Mais là, les deux instances, ensemble avec le politique, se sont regardés et ont dit : c'est une situation absolument exceptionnelle. Nous n'allons pas le faire de façon conventionnelle, nous allons faire quelque chose de différent. Nous comptons sur l'inoculation la plus rapide possible. Nous utilisons tous les vaccins disponibles.
Nous le faisons d’abord en respectant les priorités, de sorte que les personnes très âgées et les plus menacées aient la préférence. Mais ensuite, nous avons une autre exigence. Et cette exigence est que nous voulons vacciner autant de personnes que possible, le plus rapidement possible. Et pour ce faire, nous allons utiliser tous les moyens possibles. Par exemple, nous priorisons complètement la première dose de vaccin afin de tirer le meilleur parti des vaccins disponibles. Nous allons si loin que nous quittons également la zone d'approbation officielle du vaccin BioNTech. Un comité de recommandation a mis une période plus longue entre la première et la deuxième dose.
Hennig: Donc, le taux de vaccination devrait également être augmenté en Allemagne, si maintenant, à juste titre, certains assouplissements sont voulus politiquement et socialement, par exemple la réouverture des écoles et des écoles primaires. En Allemagne, cependant, de plus en plus de rapports indiquent qu’il reste des doses du vaccin AstraZeneca non utilisées parce que les gens ne respectent pas les rendez-vous par suspicion. Vous venez de mentionner la deuxième dose, parce que des doses de vaccin sont réservées afin qu’on puisse être assuré que tous ceux qui sont vaccinés avec la première dose reçoivent effectivement la deuxième. Si vous l'examinez attentivement et que nous essayons de gagner du temps, est-ce la bonne façon de continuer en Allemagne ? Surtout si on regarde l'exemple de l'Angleterre, où les choses vont différemment.
Juste une dose, mais plus de personnes vaccinées ?
Drosten: Je ne veux pas juger du pour et du contre pour l’instant. Je crois que l'évaluation est faite par différentes parties de la société de leur propre point de vue. Si on peut dire quelque chose, c’est qu’il existe des moyens de faire face à cette pandémie. Bien sûr, vous devez être clair sur les scénarios possibles. Il faut d'abord rassembler les choses, comme par exemple : nous avons maintenant un nouveau modèle, que je considère très adéquat, de DIVI, l'association de soins intensifs qui l'a également fait avec des modélisateurs. Ils arrivent à la conclusion qu'avec le taux de vaccination désormais attendu en Allemagne et la situation actuelle de la population allemande en matière d'immunité, d'infection, etc. des personnes qui ont fait le Covid, nous n’y arrivons pas. Si vous additionnez tout cela, la modélisation de DIVI arrive à la conclusion que nous serons inévitablement confronté à un lourd fardeau de soins intensifs en mai si nous faisons immédiatement un déconfinement important. La conclusion est que la mesure la plus efficace en Allemagne serait de ne procéder à aucun assouplissement avant la fin du mois de mars. Comme je l'ai dit, je n’évalue pas du tout ceci en tant que citoyen ou politiquement ou de toute autre manière. C'est le résultat de la modélisation. Je pense que cette modélisation est basée sur de très bonnes hypothèses. Parce que vous devez toujours faire des hypothèses dans cette modélisation. Et les hypothèses, il faut les regarder et évaluer leur réalisme, et je les considère comme réalistes.
Hennig: Il faut aussi supposer, par exemple, que la vaccination protège également contre la transmission du virus à 70%.
Drosten: Exactement. Telle est la valeur qui y est acceptée. Vous devez faire des suppositions si vous voulez aider à modéliser l'effet de la vaccination sur l'immunité de la population. Vous devez absolument le faire. Sur la base des études disponibles, je considère cette hypothèse comme réaliste. Peut-être même un peu conservateur. Nous pourrons reprendre cette étude plus tard dans notre conversation.
Hennig: D'accord, si nous essayons de l'examiner de manière pragmatique. Car un argument souvent répété est que le nombre de décès s'est stabilisé. Si vous regardez le registre des soins intensifs DIVI, vous pouvez voir qu'environ 5 000 lits sont actuellement libres. Mais un tel modèle de prévision peut nous donner une direction. Il faut donc faire quelque chose. Que diriez-vous si nous regardons l'intervalle de vaccination entre les doses un et deux, la dose recommandée, alors il y a un intervalle maximum dans ce qui est recommandé en Allemagne par la STIKO ( Commission permanente de vaccination ) de six semaines avec les vaccins ARNm, et jusqu'à douze semaines avec AstraZeneca, soit trois mois. À votre avis, serait-il plus utile de maximiser cela parce que ce serait plus rapide et plus pragmatique ? Autrement dit, que le STIKO doit revoir cela et peut-être élargir la recommandation.
Drosten: Le STIKO doit en fait surveiller ce qui se passe en permanence. Mais il y a deux choses différentes. L'un est l'approbation, c'est-à-dire que l'entreprise qui fabrique le vaccin demande une approbation dans un certain domaine. Et les autorités d'approbation, ce n'est pas le STIKO.
Hennig: C'est l'EMA.
Drosten: Oui. Le membre allemand est l'Institut Paul Ehrlich. Ils autoriseront alors tout au plus ce qui a été recommandé. En Angleterre, si j'ai bien compris, les choses se sont faites différemment. Le comité de recommandation politique et puis au sein des décideurs politiques, la décision a été prise de quitter cette zone d'approbation pour BioNTech et d’élargir l’intervalle à trois mois. Ce fut une exigence politique de donner la priorité la première dose de vaccin. En d'autres termes, ils considèrent essentiellement ce qui se passera dans trois mois, ils ne s’en soucient pas pour le moment. Parce que leur objectif est de vouloir avoir réduit en trois mois la vitesse de propagation du virus dans la société pratiquement avec la première dose afin de pouvoir ensuite réduire les mesures de distanciation et ainsi continuer à mener une lutte contre les infections , c'est-à-dire une valeur de Rt globalement inférieure à un. C'est l'exigence cachée ou peut-être - je ne sais même pas - ouvertement déclarée qui se cache derrière tout cela en Angleterre. Il faut dire que je ne suis pas quelqu'un qui a assez de temps libre pour voir toutes les nouvelles et les décisions politiques anglaises. J'ai obtenu cette information, par exemple, dans une publication scientifique que j'ai lue. Je ne connais pas non plus la complexité du processus décisionnel en Grande-Bretagne. Mais ce sont les informations de base dont je dispose.
Augmentation du nombre de mutants britanniques en Allemagne
Il ne reste plus qu'à réfléchir à la situation en Allemagne. Nous avons déjà dit que le même virus était présent. Cela augmentera aussi chez nous. Nous avons une société très, très âgée. Nous avons cette projection du DIVI. Nous avons des voix dans le public qui répètent que tout sera terminé d'ici mars parce qu'il y a un effet saisonnier. Je m’intéresse très peu à de telles évaluations. Pour moi, elles ne sont pas scientifiquement défendables. Il existe de nombreuses autres estimations scientifiquement justifiables qui indiquent qu'une réduction maximale de 20 pour cent peut être attendue en raison d'un effet saisonnier. Il y a, par exemple, une très bonne étude du groupe de Marc Lipsitch, qui a entre-temps été publiée dans "Science". Nous n'avons aucune raison, même sur la base de contre-observations réelles dans les pays plus chauds et ainsi de suite, de supposer que nous pouvons nous attendre à un effet saisonnier ici, qui est le même qu'avec les coronavirus froids normaux. Nous devons supposer que le maximum auquel nous pouvons nous attendre est là. Et que l'effet saisonnier ne sera pas de grand secours. Ceci est une considération basée sur le fait que l'immunité de la population ne profite pas de l'effet saisonnier. C'est un point très important. Il est important pour moi d'avoir répété cela ici, parce que parfois cet effet saisonnier est utilisé comme argument meurtrier en public. Les scientifiques essaient de tout projeter et de tout calculer aussi précisément que possible. Et puis quelqu'un arrive et dit : Le sujet sera terminé, car le soleil commence à briller.
Hennig: C'est peut-être aussi la vérité qui fut perçue l'année dernière, lorsque nous sommes entrés dans l'été avec des chiffres d'incidence beaucoup plus faibles.
Drosten: C'est vrai. C'est une différence essentielle. Les chiffres à l'époque avec lesquels nous sommes sortis de la première vague de confinement n'étaient pas seulement globalement inférieurs, mais vous devez également être conscient que le virus était distribué différemment. En termes concrets, lors de la première vague, nous avons eu une entrée directe en Allemagne principalement de personnes qui avaient déjà voyagé. Beaucoup sont allés au ski. Ce sont des compartiments sociaux qui peuvent être facilement atteints grâce à de telles mesures. Mais ensuite, nous avons eu des effets de redistribution sur toute la période. Et nous savons relativement bien que le virus a désormais également atteint des secteurs de la société qui ne sont pas facilement accessibles. Ceux qui ne voient pas qu’ils doivent être coopératifs, ou qui parfois ne comprennent pas du tout ce qui se passe. Nous devons tenir compte de tous ces éléments et veiller à ne pas nous retrouver naïvement dans une situation qui tombera par la suite de tout son poids sur l’économie. Et là où nous aurions vraiment un problème plus grave que nous ne pourrions pas guérir aussi rapidement. Cependant, je tiens également à souligner une fois de plus que je comprends parfaitement, surtout en tant que citoyen, que l'on souhaite naturellement se détendre. Il faut donc regarder très attentivement où on peut effectuer un certain relâchement. Bien sûr, vous pouvez demander à nouveau à la science. La science peut alors dire, sur la base de certaines considérations qui peuvent à nouveau être scientifiquement justifiées, que certains domaines peuvent être traités différemment des autres. Bien sûr, vous devez examiner les différents domaines de l'économie, du commerce, des loisirs et de la culture. Dans le cas de la culture, par exemple, il y a clairement des lieux qui ont des systèmes de ventilation.
Hennig: Beaucoup de milieurs cultures disent qu’ils ont été presque les premiers à proposer des concepts d'hygiène parfaits. Et le nombre de personnes présentes est clairement défini, contrairement, par exemple, dans le commerce de détail.
Drosten: Absolument. Parfois, j'ai déjà le sentiment qu'il y a eu des combats ou des luttes si durs les uns contre les autres lors des derniers tours de décisions politiques qu'au bout du compte, on arrive à dire ici et là: d'accord, ce sujet, nous devons maintenant l’aborder dans sa globalité. Ce Nous n’allons pas examiner tout cela dans le détail. C'est ainsi qu’il me semble parfois que la politique opère alors ces grands mouvements décisionnels. Dans certains cas, il n'est même pas correctement communiqué au public de quelle façon cela fonctionne. Alors aussiil faut voir comment cela est perçu par une personne comme moi. J'ai certainement participé à de telles séances de consultation scientifique. En fin de compte, cependant, les décisions ne sortent pas des niveaux de détail des conseils donnés. Laissez‑moi vous donner un exemple. Lors des séances de consultation envers les politiciens, il est répété à maintes reprises qu'une ligne de décision naturelle pour une école est au-dessus de l'âge de l'école primaire. Parce que les données scientifiques montrent que tous les groupes d'âge transmettent ce virus. Mais qu'il y a des signaux dans les données que l'activité infectieuse est plus faible à l'âge de l'école primaire. Les scientifiques qui participent à de tels cycles de consultation recommandent sans aucun doute que si on veut d'abord ouvrir quelque part, c’est à l’école primaire, mais en-dessous d’un certain niveau. Alors disons que la cinquième année est différente de la quatrième année. Cela est dit. Mais vient alors d'un tel groupe politique - et j'entends que le soir dans les nouvelles que les écoles ont été fermées. Sans ne plus faire aucune distinction.
Utiliser les concepts existants
C'est la même chose dans de nombreux autres domaines. La scène culturelle est donc fermée. Mais alors, vous n'entendez plus cette information particulière, qui est clairement transmise aux politiciens lors des séances de consultation. Qu’il faut regarder également où se trouvent des solutions de ventilation et de climatisation. Dans le secteur de la gastronomie, nous avons déjà eu cette discussion dans la première vague de confinement puis lors de l'ouverture en été, qui heureusement a ensuite été mise en œuvre en utilisant l'espace extérieur. À ce stade, il faut dire que même si aucun effet estival sur le virus n'est à prévoir dans une large mesure, un effet de terrasse pour le secteur de la restauration peut être espéré. Mais rien de tout cela n'est plus de la science. Des avis scientifiques sur ces sujets existent depuis longtemps. Même si vous avez parfois le sentiment que des choses sont posées à plusieurs reprises lors de ces consultations. Les politiciens demandent donc s’il y a-t-il de nouvelles découvertes. Le scientifique dit : en principe non, mais j'ai déjà dit quelque chose à ce sujet. C'était il y a cinq mois. Il faut peut-être revoir les anciens procès-verbaux pour ne pas trop allonger la durée de cette réunion. C’est de cette manière que des conseils sont parfois dispensés au sein de ces comités.
Hennig: Ce que vous avez dit à propos des écoles est très intéressant, car la perception du public est encore un peu que c'est la science qui a recommandé que nous fermions également les écoles primaires. Eh bien, avec l'ouverture des écoles élémentaires, quelque chose bouge à nouveau qui a une bonne base scientifique, comme vous l'avez décrit.
Drosten: Oui, absolument. Même en mars, quand il a été décidé de fermer des écoles pour la première fois, ce ne sont pas les scientifiques qui l'ont recommandé. Au contraire, les scientifiques ont en fait dit (j’étais l'un d'entre eux, mais au fait, je n'étais pas le seul) qu'il fallait regarder la situation telle qu'elle était à Gangelt (municipalité de Rhénanie du Nord-Westphalie). A cette époque, les écoles de Gangelt venaient de fermer. Nous avons donc dit que la bonne approche était de regarder attentivement, où ce virus va alors se distribuer. À ce moment-là, c’était la phase où les étincelles volaient juste au-dessus de notre pré parsemé de paille. Il n'était pas distribué également partout. Nous avons donc dit : pour le moment, vous devriez regarder de plus près localement. Et le lendemain matin, nous avons été complètement surpris lorsque nous avons lu dans le journal : ce soir, il a été décidé de fermer toutes les écoles.
Hennig: Cette distribution aussi régionale de l'époque, distribution inégale, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Je voudrais revenir sur la question de l’intervalle de vaccination à partir des mesures. Ma question initiale était la suivante : si nous voulons accomplir beaucoup, pouvons-nous y parvenir si nous ne nous tenons plus à ce délai maximum autorisé par l'approbation de l'EMA, l'Agence européenne des médicaments, c'est-à-dire choisir la voie anglaise et sortir de ce qui a été approuvé ? Pouvons-nous faire mieux ainsi, en vous basant sur votre évaluation ?
Drosten: Oui, exactement, revenons à cela. Je digresse. Je sais, je suis désolé.
Hennig: Mais nous vous avons écouté avec intérêt.
Drosten: Nous devons regarder quelle est notre situation en Allemagne. Quelle est notre marge de manœuvre. Il est clair que nous n'avons pas cette mobilisation du pouvoir vaccinal comme en Angleterre. Nous devons donc comprendre que nous ne pouvons pas nous passer d’interventions non pharmaceutiques dans un avenir très proche. Cela devient vraiment très difficile quand on se détend trop vite. Vous vous heurtez naïvement à une situation. Il faut être clair: comment gagner quoi que ce soit de la vaccination ? En Allemagne, les médias ont l'impression que le vaccin AstraZeneca n'est pas du tout accepté. Mais quand vous parlez à des gens qui sont proches du niveau de l'exécution, ils vous diront que ce n'est pas du tout vrai. Nous n'avons pas ce problème de ne pas l'accepter, mais plutôt un problème de logistique et de coordination. Les problèmes ne sont pas nécessairement toujours que le patient dit: Quoi, Astra? Non, alors je rentre à la maison. En réalité, les questions sont plutôt : combien y a-t-il d'enregistrements ? Comment sont les stocks ? Cela devient incroyablement compliqué. Comment se passe la prise de rendez-vous ? Qui est actuellement autorisé à s'inscrire à la vaccination ? Et comment cela fonctionne-t-il réellement pour vous inscrire ?
Toutes ces choses jouent également un rôle. Dans la phase initiale, nous avons vu que le vaccin BioNTech avec la quantité minimale disponible au début, qu’il était bien inoculé alors que le vaccin Astra ne l'était pas. Mais maintenant, il faut se demander qui recevait le vaccin BioNTech dans cette phase initiale. Ce sont, par exemple, les résidents des maisons de retraite médicalisées. Le vaccin y est amené. Vous n'êtiez pas obligé de vous inscrire, cela était planifié. Le groupe cible du vaccin Astra est actuellement un groupe cible complètement différent. Les moins de 65 ans, en particulier les groupes à risques professionnels qui sont mis en cause, par exemple les effectifs des grands hôpitaux, etc. Et il y a des questions politiques et logistiques à clarifier. Dans quel hôpital aller en premier ? Comment organiser cela ? Le médecin du travail le fait-il ? Fait-il un centre de vaccination ? Il existe de nombreuses solutions locales à ces problèmes. Et puis, oui, oui, il y a aussi des discussions au sein de la main-d'œuvre des hôpitaux pour savoir si le vaccin Astra est vraiment un vaccin de seconde classe. Oui ou non. L'expérience montre cependant que cette discussion a déjà été largement débattue dans ces milieux médicaux et que ce fut en faveur du vaccin Astra. Ce n'était pas seulement le cas à la Charité. J'ai également entendu de nombreux autres hôpitaux qu'après un moment d'hésitation, également face à des informations trompeuses dans les médias, il a longuement été clarifié où se trouvent les points clés et pourquoi il ne faut pas hésiter à se faire vacciner avec Astra, dès maintenant parmi le personnel médical. Et maintenant, le vaccin Astra a été très bien accueilli dans ce domaine du personnel. Or, rien de tout cela ne résout les problèmes de hiérarchisation dans la population générale. Ce sont donc encore tous de petits stocks pour le moment.
Hennig: Peut-être que nous reviendrons sur la logistique dans un instant. Mais la question de la priorisation et aussi la question de la distance entre les deux doses sont un peu liées l'une à l'autre. Peut-être vaut-il la peine de jeter un coup d'œil à l'Écosse et aussi à l'Angleterre. De là, nous avons de nouvelles données sur l'efficacité de la vaccination après la première dose. De l'Ecosse, par exemple, uniquement lié aux séjours à l'hôpital. Mais cela s'applique à la fois à BioNTech et au vaccin AstraZeneca. Et avec les personnes plus âgées, de plus de 80 ans, il fait même un peu mieux que BioNTech.
Drosten: Oui, c'est vrai. Nous avons trois nouvelles études d'efficacité, qui peuvent être intéressantes du point de vue du concept. Il y a les valeurs d’efficacité, utilisées pour les approbations, c'est-à-dire celles les études de phase III en cours. Où quelqu'un qui est vacciné dans le cadre du programme qui est comparé à un placebo ... Je serai donc répertorié comme participant à une telle étude. Je ne sais pas si je recevrai une vaccination ou un placebo. À la fin, il sera vérifié si je suis infecté. Il est ensuite comparé au groupe placebo, qui s'est également présenté au centre de vaccination, avait une injection dans le bras, mais n'a malheureusement pas reçu de vaccin. Il est ensuite comparé exactement. Ce type d'étude est l'étude d’efficacité.
Hennig: Donc, à ne pas confondre avec le risque individuel, car on compare le nombre d'infections ou de maladies dans le groupe placebo par rapport au groupe de vaccination?
Drosten: C’est cela. L'efficacité est le résultat d'une étude d'enregistrement contrôlée par placebo. Alors que l'efficacité, que l'on peut maintenant juger pour la première fois dans plusieurs études, est tout simplement le résultat de la vraie vie. Donc, si maintenant vous vaccinez régulièrement après approbation, comment les personnes vaccinées sont-elles protégées ?
Hennig: Et c'est un nombre relativement important. Vous venez d'indiquer l'Écosse, l'Angleterre et Israël, d’où nous obtenons d'énormes quantités de données.
Drosten: En effet. Bien sûr, ce sont des programmes d'études beaucoup plus vastes. La précision de ces études n'est bien sûr plus aussi grande, car tout ne peut plus être suivi avec autant de détails. Et parce qu'il faut parfois travailler avec des approches légèrement différentes. En Écosse, par exemple, un système de notification a été utilisé. En principe, il s'agit d'une connexion entre les médecins généralistes, puis les rapports électroniques, puis les laboratoires et aussi les hôpitaux. Pour que vous soyez immédiatement informé lorsque quelqu'un a été vacciné. Alors que lui arrive-t-il, est-il testé positif ? Doit-il voir un médecin ? Vient-il à l'hôpital ? C'était aussi le critère de cette étude. Alors ils se sont concentrés sur un critère, à savoir dans quelle mesure cette vaccination protège-t-elle réellement contre l'hospitalisation. Ce sont des personnes relativement âgées, car en Ecosse, en Angleterre et en Israël, comme partout ailleurs, les personnes âgées ont été vaccinées en premier. Vous avez ici une composition d'étude différente des essais d'efficacité, qui portent souvent sur des personnes relativement jeunes et en bonne santé. L'accent est mis ici principalement sur les personnes âgées qui ont reçu été vaccinées en priorité. Bien sûr, il faut toujours s’attacher à constituer un groupe de la population normale qui n'a pas été vacciné et qui est comparé à celui-ci. Vous faites cela après et non à l'avance en randomisant une vaccination ou un placebo. C'est donc différent d’une étude d'efficacité. Maintenant, je peux peut-être la résumer très brièvement.
Cette étude écossaise porte sur environ 1,14 million de personnes qui ont été vaccinées entre le 8 décembre et le 15 février. Je pense que comme en Angleterre, en Écosse ils ont aussi commencé avec le BioNTech et l’AstraZeneca est venu plus tard. Ce que l'on peut dire est que la première dose du vaccin BioNTech protège à 85% contre l'hospitalisation, environ quatre semaines après la première dose de vaccination. Et la même période, pour AstraZeneca c’est de 94%, donc encore mieux. Est-ce une vraiment différence maintenant ? Je dirais que non. Il y a tellement de facteurs perturbants. Par exemple, simplement le fait que la vaccination BioNTech ait commencé un peu plus tôt et, bien sûr, au tout début, ce sont surtout les très vieux et très en danger qui ont été soignés. Peut-être plus dans les grandes villes que dans les provinces, pour des raisons purement organisationnelles. Je pense que tout le monde peut comprendre qu'il y a simplement des effets perturbateurs qui ne peuvent être entièrement contrôlés. Dans l'ensemble, l’étude semble indiquer que même avec les personnes âgées, chez qui le système immunitaire est plus faible et donc qui réagissent plus faiblement aux vaccins, on observe une protection contre l'hospitalisation de 85% avec le BioNTech et de 94% avec l’AstraZeneca.AstraZeneca aussi pour les personnes âgées
Hennig: Si nous généralisons cela, cette information est également importante pour nous car le STIKO n’avait pas recommandé l’AstraZeneca pour les personnes âgées car nous n'avions pas encore assez de données. Et maintenant, il y a des données qui nous disent que nous pouvons supposer que les deux vaccins seront à peu près les mêmes, même pour les personnes âgées en termes d'hospitalisation.
Drosten: C’est cela. Cette situation est en train de changer et le STIKO peut également en tenir compte pour ensuite adapter les recommandations. Thomas Mertens a déjà indiqué que le STIKO allait le faire, de sorte que nous aurons probablement une recommandation pour l’AstraZeneca dans chaque groupe d'âge.
Hennig: Cela correspond-il aux données d'Angleterre ?
Drosten: Oui, absolument. Il existe également une étude en Angleterre. Cela a été fait encore un peu différemment. Ils ont d’abord regardé qui avait un résultat positif à la PCR. Et qu'arrivera-t-il à ces gens dans les quatre ou cinq semaines qui suivront. Et qui a été vacciné ? Donc, parmi les positifs PCR, combien ont été vaccinés ? Parmi les négatifs PCR, combien ont été vaccinés ? C’est fait d’une autre façon, mais on peut également en tirer des valeurs. C’est assez bien résumé dans la discussion de cette étude, qui a été publiée sous forme de pré-impression. Des fourchettes de valeurs y sont données. Je pense qu'il est plus logique de le dire de cette façon que de travailler avec les valeurs réellement observées. Parce qu'alors, de fausses perceptions réapparaissent dans les médias. Donc ici il est bien dit que ce sont des données de protection approximatives, et ici non pas contre l'hospitalisation ou la mort, mais contre la maladie symptomatique. Le plus intéressant à observer est que la première dose de BioNTech agit à 60 à 70% contre la maladie symptomatique dès la première dose, et pour l'AstraZeneca, c’est de 60 à 75%.
Hennig: Cela inclut également des symptômes plus légers.
Drosten: Oui, cela inclut toutes sortes de symptômes qui mènent à un test. Et puis le test est positif. Le cas de diagnostic standard est simple. Pour BioNTech, cette étude fournit même des informations pour la deuxième dose. Chez AstraZeneca, cela n'est pas encore possible car ils ont commencé à vacciner plus tard. Mais ici avec la deuxième dose, c'est-à-dire avec la vaccination complète, cet effet protecteur est de 85 à 90%. Cela correspond donc largement à ce qui a déjà été vu dans les données fournies à l’approbation des essais d'efficacité, un vaccin très efficace. Et apparemment aussi l’AstraZeneca est un vaccin tout aussi efficace.
Hennig: Et puis nous avons déjà indiqué que les données d'Israël, ce sont des évaluations des données de la plus grande compagnie d'assurance maladie là-bas, Clalit Health Services. Plus de la moitié de la population y est assurée. Nous avions déjà des parties des données qui pouvaient être lues dans les journaux au début de l'année. Il existe maintenant une étude évaluée par des pairs dans le New England Journal of Medicine. Il s'agit du vaccin de BioNTech et Pfizer. Mais même là, l'efficacité se décompose après la première dose et aussi un peu après la deuxième dose, en fonction des symptômes, des séjours hospitaliers et des décès.
Drosten: C'est également intéressant. Et là aussi, on a commencé par vacciner les personnes âgées. Ici, on est également un peu plus avancé dans les tranches d'âge. Ici, environ quatre semaines après la première dose, vous bénéficiez d'une protection de 66% contre les infections symptomatiques, 78% contre l'hospitalisation et 80% contre les maladies graves. Incidemment, même une valeur comme la protection contre les décès est de 84 pour cent. Mais je suis toujours un peu sceptique quant à savoir si de telles valeurs devraient vraiment être prises comme référence. Parce que le fait qu'une personne soit décédée alors qu'elle avait été vaccinée, bien sûr, dépend de l'état de base des personnes très âgées, dans certains cas. Vous ne savez pas avec certitude si la vaccination pourrait vraiment empêcher quelque chose ici. Aussi, ce sont aussi de petits nombres qui sont en jeu. Je pense qu'il faut plutôt regarder les différents degrés de gravité de la maladie. À propos, il existe également une estimation de toutes les infections détectées, qui est alors de 60%. Et il y a même une tentative d'estimation distincte : est-ce que la première dose protège aussi contre les infections asymptomatiques, que l'on connaît également ? Quatre semaines après la première dose, il y a 52% de protection contre l'infection asymptomatique d'une personne. C'est une très bonne nouvelle. Jusqu'à présent, on n’en avait que peu d’idées. Et d'ailleurs, une semaine après la deuxième dose, la protection contre l'infection asymptomatique est déjà de 90%. Les données rassemblées dans cette étude ne cessent donc de s'améliorer grâce aux essais d'efficacité. Le STIKO peut certainement l'utiliser pour développer davantage ses décisions. Mais je ne pense pas, pour revenir au début de la discussion, que le STIKO quittera le champ des recommandations étables lors de l'approbation. Le domaine d'approbation est qu'avec le vaccin BioNTech, il y a un maximum de six semaines entre les deux doses, avec le vaccin Astra, cependant, jusqu'à trois mois. C'est parce que c'est ce qui a été demandé par les fabricants de vaccins sur base de leurs données qui a été approuvé.
Hennig: Un autre aspect de l’augmentation du taux de vaccination en Allemagne est également la priorisation. Ceci est déjà discuté un peu politiquement au niveau régional. Dans la zone frontalière avec la République tchèque, par exemple, on se demande s’il ne faudrait pas d’abord vacciner les jeunes maintenant afin de mieux contrôler le processus d'infection par le mutant. Faut-il revoir les modèles ?
Changer la priorisation de la vaccination ?
Drosten: Oui, je pense. Bien sûr, nous avons maintenant de toute façon des critères qui ont évolués. Soyons clairs : l’AstraZeneca sera désormais recommandé pour tout le monde, y compris les plus de 65 ans. À partir de cela, le changement pour les médecins généralistes est fondamental. Parce que chez AstraZeneca, nous avons un stockage au réfrigérateur possible et non à moins 80 degrés dans des conditions spéciales. Même cela devrait être pris en compte différemment dans les modèles. Mais il y a aussi un processus de discussion sociale en cours, qui est encore plus important dans l'ajustement des calculs de projection. Le simple fait est qu'avant, avant même que les vaccins ne soient disponibles, le Conseil d'éthique et le STIKO ont réfléchi à la meilleure manière d'aller de l'avant et d'éviter le plus grand nombre de décès. C'était bien sûr une exigence : la protection individuelle, qui, d'ailleurs, s'oppose à la protection sociale. La protection individuelle était la plus haute exigence et une stratégie a alors été établie. Maintenant, vous pouvez voir que dans la mise en œuvre pratique, tout d'abord, il n'est même pas possible de travailler par groupe de priorité. Donc, groupe de priorité un, puis les deux, puis les trois, puis les quatre. Deuxièmement, il y a des transitions en douceur. Dans de nombreux cas, vous ne savez pas exactement à quel groupe de priorité vous appartenez. À moins que ce ne soit une question d'âge. Mais ce n'est pas seulement à propos de cela, c'est aussi une question d'exposition professionnelle. Il s'agit de maladies sous-jacentes. Quelle pourrait être la gravité réelle d'une maladie sous-jacente, etc. Il existe des formes bénignes de certaines maladies sous-jacentes. Eh bien, le diable est dans les détails et bien au-delà. Ces discussions, qui en découlent déjà, pénètrent également très fortement le public. Ces discussions trouvent également de la substance dans les décisions politiques. Par exemple, la décision de donner la préférence à la vaccination des enseignants et de les inscrire simplement dans le groupe prioritaire deux, là où ils n'étaient pas auparavant. Toutes ces considérations fonctionnent en parallèle. Cela devient de plus en plus déroutant pour le public. Par exemple, à l'heure actuelle, il existe une perception générale selon laquelle ces niveaux de priorité sont comme des escaliers. Disons que la distance entre le niveau un et le niveau deux est aussi grande que la distance entre le niveau deux et le niveau trois.
Hennig: En ce qui concerne le risque, la mise en danger.
Drosten: C'est cela. Ou encore la valeur sociale, c'est-à-dire la protection individuelle, etc., tout ce qui s’y rattache. Ce n'est pas que ces niveaux ne soient pas équivalents, mais il est tout à fait clair que le niveau de priorité un est largement mis en avant. Donc les très vieux, les résidents des maisons de retraite, y jouent un rôle important. Et puis il y a des maladies sous-jacentes très spécifiques, que même en tant que citoyen normal, vous ne connaissez même pas comme facteur de risque spécial. Par exemple, je mentionnerais la trisomie 21. Ce n'est pas ce que le citoyen normal a à l’esprit. C'est un facteur de risque établi. Ensuite, lorsque ces groupes ont reçu le vaccin, les étapes suivantes ne sont plus en pente uniforme, mais vous entrez rapidement dans un domaine où la notion de risque individuel devient de plus en plus flou. Mais par rapport à la population normale, ces risquent ne sont plus aussi grands. Il faudra aborder ces problèmes à un moment. Et, comme le STIKO le prévoit également, à un moment donné, cette discussion deviendra sans grande importance. Parce qu'alors il y aura suffisamment de vaccins. Et dès lors, la priorisation n’aura plus lieu d’être.
Les maladies courantes sont également des facteurs de risque
Hennig: D'autant qu'il y a bien sûr aussi des facteurs de risque. Par exemple pour le phénomène de covid long, qui n'est plus compris aujourd'hui comme une maladie sous-jacente au sens social. Donc, le surpoids, les études que j'ai vues, est toujours un facteur très important qui est un facteur de risque. Et c'est en fait plus une maladie de la population de base en général.
Drosten: Cela devient vraiment compliqué. Nous pouvons peut-être ouvrir une réflexion intéressante à ce stade, qui est également importante pour moi. Effectivement, le surpoids ou l'hypertension artérielle sont de véritables maladies de civilisation qui représentent un facteur de risque. Mais comment voulons-nous mettre cela en œuvre ? Quand est-ce alors au tour d'une personne hypertendue de 60 ans de prendre rendez-vous ? Est-ce que c'est plus tôt que quelqu'un qui a 62 ans mais qui n'a pas cette haute pression artérielle ? Quel est l'ordre à suivre dans tout cela ? Et où vivent les personnes souffrant d'hypertension artérielle ? Quand reçoivent-ils leur lettre d'invitation ? Est-ce même une lettre ? Pouvez-vous demander à un diabétique de 70 ans d'aller sur Internet pour prendre rendez-vous ? Donc, tous ces problèmes quotidiens, toute cette complexité, il y a fondamentalement deux approches fondamentalement différentes. Une approche centrale est celle qui dit : trouvons ensemble les meilleures sources de données et faisons-le le plus parfaitement possible. Nous demandons aux caisses d’assurance maladie : où sont vos patients hypertendus ? Où sont vos diabétiques et autres patients atteints de maladies sous-jacentes ? Et donnez-nous les ensembles de données, ainsi que celles des autres assurances maladie, nous les rassemblerons, et nous résumerons le tout. Nous en faisons maintenant un système de rendez-vous détaillé, de sorte que nous puissions dire : le patient hypertendu avec une tension artérielle systolique de tel ou tel est plus prioritaire que celui avec un de tel ou tel. C'est bien sûr exagéré. Je parodie ici. Je pense que c'est clair. Mais c'est ce que je voulais faire. Je veux juste tenter de montrer le type d’idées qui ont été considérées au niveau de la planification. En revanche, il existe un modèle différent. Un modèle qui a fait ses preuves. Nous avons des médecins généralistes qui connaissent leurs patients et qui savent qui est réellement à haut risque. Mais ils connaissent aussi leurs patients en tant que personnes. Ils peuvent deviner qui aimerait se faire vacciner. Et ceux qui ont entamé des discussions assez compliquées et qui ont finalement pris beaucoup de temps pour se prononcer contre la vaccination. Eh bien, vous connaissez votre Pappenheimer (note personnelle : expression typiquement allemande qui signifie qu’on connaît bien les faiblesses de quelqu’un)en tant que médecin de famille. Et ce facteur, ce facteur humain dans la priorisation, n'est pas utilisé pour le moment. Je pense que c'est un gros problème.
Utilisez également l'infrastructure des usines
Et il y a autre chose à dire. Outre les médecins généralistes, il existe un autre domaine de médecine de proximité. Ce sont les médecins d’entreprise. Et de nombreuses personnes, y compris celles à risque, ont un emploi. Dans les services médicaux de l'entreprise, en particulier dans les grandes entreprises, nous avons un tel potentiel que nous n'utilisons pas, également en ce qui concerne la priorisation. Les médecins d'entreprise savent exactement comment ils décident au sein de la main-d'œuvre chaque année pendant la saison de la grippe qui doit réellement recevoir le vaccin préféré. C'est aussi un facteur pour prioriser une vaccination. Les médecins d'entreprise peuvent effectivement également établir des priorités. Et c'est de plus en plus mon sentiment, au plus je parle aux gens qui s’occupent de la planification. Le fait est que nous apportons au public un plan absolument précis pour s’attaquer à la pandémie et pour construire un système organisationnel transparent, alors que nous n’utilisons pas les structures éprouvées du moment. C'est vrai, il y a des discussions préliminaires avec les associations de médecins de l'assurance maladie publique. Vous pouvez le lire dans les journaux. Il y a des rapports qui disent que d'ici avril ou mai au plus tard, nous aurons une abondance de vaccins. Et les médecins de famille doivent planifier cela dès maintenant. Mais la question que je me pose et que se posent les médecins de famille est : où est le planning ? Quel est exactement le plan établi ? Et mon expérience au cours des dernières semaines en parlant aux gens en charge de la planification m'a beaucoup inquiété. On m'a souvent dit quelque chose comme : Pourquoi ? Les centres de vaccination ont des centaines de milliers de capacités de vaccination par jour, nous le savons. À ce stade, mon inquiétude grandit vraiment. Parce que les centres de vaccination sont à la périphérie, ils sont organisés par les états fédéraux. Les rapports seront certainement retournés au niveau fédéral. Mais je me demande toujours : combien de niveaux de reporting y a-t-il entre les deux ? Et à quel point tout cela est-il réaliste ? Voilà la question que je me pose.
Et d'un autre côté, je me demande : en avons-nous vraiment besoin ? Ou est-ce devenu obsolète depuis longtemps ? Parce que nous savons qu'aux USA, par exemple, le vaccin Pfizer/BioNTech est homologué différemment en termes de stockage. Aux États-Unis, vous n'avez plus besoin de ce stockage à moins de 80 degrés. Au contraire, pour un stockage intermédiaire à plus long terme, qui comprend des périodes importantes, je ne sais plus exactement combien de temps, mais plusieurs semaines, il a maintenant été approuvé que vous puissiez le stocker dans des réfrigérateurs normaux à moins 20 degrés, ce que les médecins et les pharmacies possèdent également.
Hennig: C’est deux semaines, j'ai vérifié ce que dit la FDA.
Approbation de la FDA du vaccin Johnson & Jonson
Drosten: Voilà. Cela signifie que cela ouvre un bien meilleur accès au fait que même le vaccin BioNTech peut être inoculé dans les cabinets des médecins généralistes. Ce n'est pas encore le cas chez nous. Mais bien sûr, il faudra que le fabricant en fasse également la demande pour l'Europe. Je suppose que ce sera le cas. Même si je ne suis pas moi-même au courant. Vous pouvez considérer beaucoup d'autres choses comme ça. Nous avons maintenant une meilleure estimation des quantités de vaccins attendues, les quantités de vaccins livrés en Allemagne. À un moment donné, vous devrez commencer à calculer. Et si on ignorait les directives du STIKO, et si l'on disait simplement : le vaccin disponible doit être inoculé. Laissons les gens décider par eux-mêmes. Laissons venir toutes les tranches d'âge au gré de leur envie. Imaginons : les patients à haut risque ont déjà été vaccinés. Et maintenant, tout le monde peut se faire vacciner. Je peux contacter mon médecin et lui demander de me vacciner. Prenons tous les vaccins. AstraZeneca ? Avec plaisir, je n'ai aucune inquiétude. Ensuite, le médecin de famille pourrait dire : Oui, bien sûr, vous aurez un rendez-vous la semaine prochaine. Je reçois le vaccin Astra. Il pourrait même dire : Oui, je peux aussi vous proposer le BioNTech car je peux venir le chercher ici au centre de vaccination voisin. C’est peut-être un peu fantasmer, mais je le fais tout à fait consciemment. Je ne veux pas propager un message, je me livre juste à un jeu mental. Ensuite, si nous prenons les données publiées pour Israël et si faisons l’hypothèse que les choses sont similaires ici, nous pourrions par exemple conclure qu’avec 50% de vaccination d'un certain groupe d'âge, on pourrait ouvrir la vie sociale, avec des mesures de contact conservées mais plus douces. Quand serait-ce possible au plus tôt ? Il y a des considérations simples, des calculs simples qui peuvent s’écrire sur un morceau de papier, qui vous permettraient de dire : Un tel taux de vaccination, vous pouvez le faire dans les groupes d'âge concernés ... Pas dans la société dans son ensemble, car pour les moins de 16 ans, aucun vaccin n'est autorisé. Mais dans la société dans son ensemble, cela pourrait facilement être réalisé à la mi-mai. Puis au début de juin, à la mi-juin, vous seriez prêt à avoir ces effets. L'immunité serait alors complètement construite dans la population. Et à cette époque alors on pourrait détendre énormément les mesures actuellement en vigueur.
Hennig: Et vous avez déjà fait un calcul approximatif de combien de vaccins seraient disponibles à quel moment, sur la base de tout ce que nous savons. Parce que malgré tout, c'est un argument très important dont on parle toujours, nous n’avons pas assez de vaccins.
Drosten: Les quantités livrées augmenteront considérablement au deuxième trimestre. Vous pouvez l'entendre partout dans les médias. Cela correspond également aux évaluations et aux documents disponibles. Au deuxième trimestre, il sera beaucoup plus important de s'assurer que la première dose est réellement inoculée le plus efficacement possible tout en utilisant un délai maximum entre les deux doses. Au niveau de la planification, Ii y a des idées, il y a des propositions y compris dans les cercles d'experts, en d'autres termes, il y a des scientifiques comme moi et beaucoup d'autres qui font de telles suggestions aux autorités, à l'Institut Robert Koch, au ministère de la Santé, etc. À l'heure actuelle, ces propositions sont de plus en plus mises en œuvre. Rendez-vous compte qu’il a maintenant été décidé que les enseignants seront prioritaires pour la vaccination, ce n'est pas seulement en considération de la protection individuelle. Mais je commence à m'inquiéter quand je vois que les chemins essayés et testés ne sont pas utilisés, comme les médecins de famille et les médecins de l'entreprise.
Hennig: Cela signifie que, pour résumer, nous avons fondamentalement besoin de solutions plus pragmatiques basées sur des valeurs empiriques. Les médecins d'entreprise et les médecins généralistes, pour vacciner davantage les hommes et les femmes en moins de temps. Compte tenu du fait que la première dose est déjà très efficace, que les deux vaccins et même les trois, car le Moderna en fait également partie, fonctionnent apparemment très, très bien sur les personnes âgées, on pourra fondamentalement envisager les choses sous un nouvel angle. Et, si tout se passe bien, un autre vaccin sera probablement approuvé en Europe à la mi-mars, à savoir le vaccin de Johnson & Johnson. Un vaccin vectoriel qui ne prend qu'une seule dose. C'est donc encore plus rapide.
Drosten: Oui, absolument. Dans un avenir proche, le problème principal ne sera plus le trop faible nombre de vaccins. Mais il est certain que je ne suis pas le seul à m'inquiéter de savoir comment gérer toute cette logistique au deuxième trimestre, disons après Pâques. Donc, en plus du reste, il faudra faire face à cela. Parfois, j'ai le sentiment qu'un perfectionnisme à l’allemande a émergé qui veut tout rendre super génial et veut tout avoir en main à partir d'un point central, alors qu’il faut sans doute reconnaître que tout ne sera pas parfait de toute façon on n’atteindra pas cette perfection. Mais que le principal objectif commun est qu’il ne s’agit pas seulement de protection individuelle, qu’il ne s’agit pas non plus uniquement du concept technique d’immunité de la population, mais aussi de quelques mois de performance économique. Il faut réfléchir à ce que sont réellement les relations de valeur et s’il ne faut pas dire: nous utilisons toutes les forces que nous avons. Et nous permettons à de nombreuses personnes de réfléchir avant d’accepter ou non de se faire vacciner. Il en va de même pour le médecin de famille qui connaît son Pappenheimer (voir note précédente) et le médecin d'entreprise qui connaît ses effectifs.
Hennig: Concernant l'immunité de la population, vous avez brièvement indiqué que pour résoudre cette chose très complexe, il faut surtout se demander quels sont ceux qui ont le plus de contacts et doivent se faire vacciner. Au départ, il était extrêmement important de protéger les personnes âgées dans les maisons de retraite, ce n'est plus le cas et il faut se concentrer sur les plaques tournantes de nombreux réseaux de contacts qui influencent donc de manière significative le processus d'infection.
Drosten: Oui, absolument. On pourrait agir à nouveau en fonction de l'intensité du contact. Il y a dans ce sens des propositions scientifiques qui sont très bonnes. Partout où ils le disent, complétons la priorisation avec des groupes supplémentaires qui ont de fréquents contacts. Je suis juste inquiet du temps que cela prendra. Qui doit réellement gérer tout cela politiquement, à quels niveaux, jusqu'à ce que tout soit mis en œuvre alors que le temps presse. Nous avons le problème - pour revenir au début de notre discussion - qu'avec un démarrage lent, nous devrions augmenter la vitesse de vaccination plus rapidement que les Britanniques. Soit dit en passant, de mon expérience des discussions politiques et de la planification, ce n'est pas toujours de la politique qu'il faut se plaindre. Je vois en fait une volonté extrême d'agir en politique, à commencer par le ministère de la Santé. En fait, je vois davantage les problèmes au niveau de la planification et de l'exécution. Essentiellement au niveau de la planification. Là où j'ai l'impression qu’ils veulent construire des systèmes extrêmement parfaits. Et peut-être faudrait-il se demander, non pas comment prendre des rendez-vous jusqu'au plus petit détail pendant l'été, mais peut-être se poser des questions plus essentielles qui ne sont pas encore correctement réglementées pour le moment. Par exemple : quand pouvons-nous dire que la vaccination d’un certain groupe à risque peut être considérée comme achevée ? Est-ce le cas quand ils sont tous vaccinés ? Est-ce le cas quand ils ont tous un rendez-vous ? Il y a certainement quelques questions clés auxquelles on n'a pas encore répondu. Juste cette question : quand un groupe à risque passe-t-il ? Comment traitez-vous réellement les personnes appartenant à des groupes à risque qui ne veulent pas se faire vacciner ? Comment éviter que des doses de vaccin inutilisées ne soient jetées sans être utilisées ?Nous avons actuellement une discussion qui frôle le dadaïsme, sur ce qui se passe en ce moment. Un politicien s'est accidentellement vacciné parce que l'occasion se présentait et il est alors qualifié de préliste. En réalité, cependant, il était en visite sur place dans une maison de retraite. Il restait trois doses dans la bouteille le soir et elles finissent autrement à la poubelle. Il y a aussi des situations comme celle-ci. Je ne veux pas dire que tous les politiciens agissent parfaitement. Mais il s'agit de suivre les grandes lignes des recommandations et du règlement, mais bien sûr de ne pas se gêner. D'autant qu’on a aussi l'impression que l’immunité collective protègera aussi tous ceux qui non plus ne veulent pas se faire vacciner car ils n'ont pas un bon aperçu de la situation ou, d'autre part, qui ne peuvent pas être vaccinés car ils peuvent avoir certaines contre-indications. Prenons par exemple les femmes enceintes, elles ne doivent pas être vaccinées pour le moment. Il n’y a pas de données disponibles sur les femmes enceintes et ce n'est pas recommandé. Mais elles seront également protégées par la protection de horde. Ensuite, la recommandation, qui existe d'ailleurs, que les partenaires des femmes enceintes puissent les immuniser préférentiellement, est de peu d'utilité, car une femme enceinte rencontre plus de personnes que son partenaire.
Hennig: Les enfants atteints de maladies antérieures sont un autre exemple.
Drosten: Oui, j’ai simplement donné un exemple qui me vient spontanément à l’esprit.
Hennig: Nous vaccinons contre la propagation du virus pour permettre un assouplissement. Mais aussi contre la transférabilité accrue du mutant B.1.1.7, qui se répand en Allemagne. Monsieur Drosten, je voudrais que nous revenions sur les laboratoires virologiques du monde à partir d’événements quotidiens et de décisions politiques. Parce qu'il y a encore des points d'interrogation sur cet variant du virus. Nous savons, par les observations épidémiologiques, qu'il se transmet plus facilement. Mais virologiquement, il n'est pas encore tout à fait clairement établi à quoi cela est réellement dû. Nous essayons d'explorer cela chaque semaine. Il existe différentes théories. Il existe maintenant une première pré-impression de l'Imperial College de Londres, dans laquelle les données de laboratoire peuvent également être consultées. Par exemple, la question : ce mutant se réplique-t-il mieux ? Le virus peut-il donc se multiplier plus rapidement que le type de virus d'origine que nous connaissons ? Comment cela peut-il être examiné exactement ? Qu’a-t-on appris jusqu’ici ?
Avantage de distribution du mutant britannique
Drosten: Il s'agit de la première étude de laboratoire publiée sous forme de pré-impression que nous attendons depuis longtemps. Parce que nous savons que ces groupes en Angleterre ont eu accès à ces isolats de virus très tôt. Certainement deux mois plus tôt que tout autre laboratoire. Ici vous pouvez voir les premières observations de base que nous faisons également. Nous travaillons également sur ces virus ici nous-mêmes, en collaboration avec plusieurs laboratoires à travers l'Allemagne.
Ce document qui vient de sortir est très préliminaire. En principe, rien ne peut être déduit de cet article. Je peux le dire très brièvement. La réplication est examinée ici, la multiplication du virus dans des cellules Vero. Il s'agit d'une culture cellulaire standard, qui, cependant, est relativement insignifiante pour le comportement du virus dans les voies respiratoires. Ce ne sont même pas des cellules humaines. Ce sont des cellules rénales de singe vert - pour les spécialistes. Mais il existe également des cellules épithéliales respiratoires humaines qui peuvent être cultivées en laboratoire. On n’observe essentiellement aucune différence de croissance ici. Au maximum, on peut voir un petit inconvénient dans la croissance de la variante 1.1.7. Nous savons maintenant de nos propres observations de laboratoire, et cela est également indiqué dans l'article, qu'il s'agit d'un effet de culture cellulaire. En réalité, si vous regardez un certain nombre de cultures cellulaires différentes, ce virus semble se développer aussi bien que les virus de référence que vous utilisez toujours. C'est la même chose pour nous au laboratoire. Ceci est également indiqué ici, vous pouvez le voir dans les cellules épithéliales des voies respiratoires. Et c'est ce qui nous échaude à chaque fois car nous ne pouvons tout simplement pas confirmer en laboratoire ce que l'épidémiologie montre clairement et plus clairement. À savoir, que ce virus se propage d’avantage.
Données de laboratoire sur la transférabilité du variant britannique.
Et les auteurs continuent. Ils regardent un détail, à savoir le traitement de la glycoprotéine via un site de clivage, via le site de reconnaissance de la furine. C'est donc le cas, si le virus provient de la cellule, il doit être canalisé hors de la cellule. Dans ce processus d'évacuation, certaines enzymes coupent les protéines en morceaux. La furine est l'un d'entre eux. Cette furine, qui prépare la protéine de surface à sa fonctionnalité. Nous l'avons déjà dit lors de ces podcasts à plusieurs reprises. Ces molécules qui sont comme de petits objets. Vous pouvez y penser un peu comme un kit de saut d'obstacles pour enfants. Lorsque vous arrachez les pièces de la feuille du jeu le long des lignes de perforation et que lorsqu'elles sont libérées de la feuille, elles peuvent se déplacer les unes contre les autres. Ensuite, vous mettez des crochets là-dedans. Et puis à un moment donné, vous pouvez tirer ce fil, puis les pieds et les bras du cric sauteur se tortillent. Avant cela, tout était dans une feuille de carton, où il n'y avait que des lignes poinçonnées entre les pièces. Et là, vous pouvez déchirer ou vous avez besoin d'une paire de ciseaux. Donc, soit c'est facile, soit c'est compliqué. Et pour le virus du SARS-1, vous aviez besoin de ciseaux pour couper la glycoprotéine des différentes parties. Et avec le virus SARS-2, il y a déjà une ligne perforée.
(note personnelle : les protéines S du virus, aussi appelée Spike ou protéines de pointe, qui forment les pointes de la couronne typique des coronavirus, sont formées de deux sous-unités S1 et S2. En réalité, une pointe est formée de trois protéines S identiques, entrelacées. S1 est la partie située à l’extrémité, et qui possède le domaine de liaison à nos récepteurs cellulaires. On appelle ce domaine RBD, pour Receptor Binding Domain. Ce domaine a une affinité particulièrement grande pour les enzymes ACE-2, abondants dans sur les parois des cellules de notre appareil respiratoire, depuis les muqueuses nasales, jusqu’aux poumons. Ces enzymes participent aux mécanismes régulant la tension artérielle. C’est ce RBD, constitué d’un enchainement de 193 acides aminés qui est tout naturellement la cible privilégiée des vaccins, afin de produire des anticorps neutralisants, c’est à dire des anticorps qui viennent se lier à ce RBD pour l’empêcher de se lier au récepteur ACE-2. On comprend donc que des mutations dans ce RBD peuvent avoir deux types d’influences : elles peuvent modifier l’affinité de la protéine S pour le récepteur ACE-2 (cela peut avoir un impact neutre, négatif ou positif). Dans le cas du variant B.1.1.7, appelé aussi variant anglais, une mutation principalement, augmente la propagation du virus, et parmi les hypothèses, il y a celle d’une meilleure interaction avec ACE-2. D’autres mutations, comme une de celles présentes dans les variants sud-africain et brésilien diminuent les interactions du RBD avec les anticorps neutralisants produits après avoir fait le Covid ou après avoir été vacciné (ce dernier cas n’ayant encore été établi qu’in-vitro en laboratoire). Après s’être lié au récepteur ACE-2, la protéine S doit subir un changement de conformation (de forme) pour que la paroi du virus puisse fusionner avec la membrane de la cellule humaine. Cette fusion des parois se fait essentiellement à l’aide de l’autre partie de la protéine S, l’unité S2, celle qui est la plus proche de la racine de cette pointe. Il faut donc qu’une fois attachée au récepteur ACE-2, les deux entités soient coupées l’une de l’autre pour activer la protéine S. Cela se fait sur un site précis (c’est la fameuse « ligne perforée » évoquée par Drosten), constitué d’un ensemble de quelques acides aminés, dont 3 ont un caractère basique (ce sont des arginines) et qui est reconnu par une enzyme de coupure de protéines (une protéase) appelée « furine », produite par les cellules humaines (c’est la paire de ciseaux). Une fois que la paroi du virus a fusionné avec la cellule humaine, il y injecte son génome, lequel est constitué d’ARN simple brin, et non d’ADN double hélice comme dans notre propre génome. Cet ARN de coronavirus est à polarité positive, c’est à dire qu’il peut directement être lu par notre système de fabrication de protéines (les ribosomes), et qu’il ne doit pas d’abord être transformé en son ARN complémentaire, comme c’est le cas dans les virus grippaux, qui sont à polarité négative. Notons au passage, qu’il ne s’agit pas non plus de virus à ARN de la classe des rétrovirus, comme l’est le HIV, le virus du SIDA. Celui-ci embarque avec lui une enzyme appelée transcriptase inverse, qui est capable de transformer l’ARN en ADN et donc s’ajouter au génome de la cellule humaine. Ce n’est pas du tout le cas pour les coronavirus. Revenons donc à celui-ci : son ARN va utiliser nos outils cellulaires pour fabriquer ses propres proteines, et de nouveaux virus vont être assemblés à partir de ces éléments dans un organite appelé « appareil de Golgi » avant d’être expulsés de la cellule et d’infecter d’autres cellules.)
Hennig: Ce célèbre site de clivage de la furine est la différence cruciale entre le SARS-2 et les autres coronavirus ?
Drosten: C'est l'une des différences les plus importantes entre le SARS-2 et le SARS-1. Et avec une certaine probabilité, aussi l'explication de la raison pour laquelle le virus du SARS-2 peut se répliquer beaucoup mieux dans les voies respiratoires supérieures et pourquoi il est mieux excrété et transmis alors qu’il y a moins de symptômes. Et essentiellement, c'est pourquoi nous avons une pandémie avec ce virus. Maintenant, ce virus 1.1.7 a une mutation juste à côté du site de détection ... Ou il y a des acides aminés basiques qui définissent un site qui attire les enzymes de clivage. Et il y en a maintenant un de plus dans le mutant 1.1.7. On peut se demander si c’est vraiment un avantage, ou alors si c’est encore plus facile à traiter. Cela va peut-être favoriser la réplication dans les voies respiratoires supérieures et la capacité de se propager ? Les auteurs voient un petit effet subtil dans cette direction. Ils disent que cela est indiqué dans leurs données. Tant sur la base de pseudotypes lentiviraux, où l'on prend un lentivirus, un virus porteur du VIH, auquel on donne la protéine de surface du virus SARS-2 soit la version antérieure au 1.1.7. Et puis vous voyez que le clivage des protéines de surface à la surface de ce virus VIH, ce virus chimérique artificiel - on dit un pseudotype - qui ne peut pas se reproduire n'est pas un virus dangereux. C'est juste une construction, cette scission est un peu meilleure. Vous pouvez également voir que lorsque vous travaillez avec de vrais virus complets, la division est un peu meilleure encore. Et cela pourrait bien sûr aller dans cette direction. Cela pourrait expliquer pourquoi il pourrait y avoir ici une clé pour une meilleure diffusion. Cependant, il faut aussi dire que ces données sont très, très préliminaires. Et d'autres groupes de travail devraient également le confirmer avec leurs données. Il faudra attendre avant de tirer enfin des conclusions.
Hennig: Il y a beaucoup de conditionnel là-dedans et vous aussi, vous ne voyez qu’un très léger développement dans une certaine direction. Il semble qu’on soit toujours à peu près dans l’obscurité. Même si vous n'avez encore rien publié, mais que vous faites également des recherches à la Charité, avez-vous des indications allant dans une direction que vous pouvez déjà partager avec nous et qui pourraient compléter cela ?
Drosten: Eh bien, nous ne voyons essentiellement aucune différence dans les données de réplication entre le variant 1.1.7 et les virus de comparaison. Je ne peux pas encore le confirmer, mais concernant la scission, c'est presque le contraire que nous observons. Mais nous devons encore le confirmer pour nous-mêmes en interne. Nous ne pouvons pas encore publier ce que nous observons. Ce que nous pouvons certainement confirmer, ce sont les informations de neutralisation. Nous devrons peut-être en discuter séparément dans un instant. De plus, nous avons beaucoup de recherches avancées. Et je suis sûr que le groupe qui a maintenant publié cette pré-impression continuera bien sûr à y travailler en arrière-plan. Dans l'ensemble, tout ce que l'on ferait dans des expériences plausibles et évidentes, y compris l'infection de parties de tissus extraites de la gorge des gens, lors d'opérations des amygdales, par exemple, qui peuvent ensuite être infectées en laboratoire, pour voir comment le virus se réplique dans de vrais tissus de la gorge, par exemple ... Vous pouvez faire ce genre d'examen dans un laboratoire. Mais jusqu'à présent, je n'ai vu aucune preuve révolutionnaire dans notre laboratoire ou dans d'autres laboratoires. En d'autres termes, nous devons simplement supposer que les données épidémiologiques seront bien sûr correctes. Elles se confirment dans différents pays. Cette constatation est évidente. Dans le laboratoire, nous ne devons pas nous contenter de ce qui se trouve dans le tiroir du haut, mais aussi autres les tiroirs, où il faut se pencher un peu pour y accéder. Ainsi, par exemple, posez des questions fondamentales telles que de savoir si ce virus 1.1.7 pourrait même utiliser un autre récepteur supplémentaire. Des choses de ce type qui demandent de vraiment creuser dans la recherche fondamentale, dans le sac à astuces, pour rattraper son retard. En d'autres termes, les enquêtes simples et directes qu’on effectue en premier ne nous donnent aucun indice révolutionnaire pour le moment.
Hennig: La semaine dernière, nous avons parlé à Sandra Ciesek d'un article de Harvard dans lequel, sur la base de données d'observation, bien que provenant d'un très petit groupe de personnes infectées, on suppose que la durée globale de l'infection est plus longue pour B.1.1.7 et aussi dans les différentes phases ultérieures et que la charge virale est légèrement plus élevée à son point le plus élevé. Cela correspond-il à l'image ici, si de telles hypothèses étaient confirmées ?
Drosten: Je peux affirmer que nous constatons maintenant également une augmentation de la charge virale dans nos propres données de laboratoire. Nous avons un volume de tests relativement élevé, maintenant plusieurs centaines de cas de ce variant 1.1.7, de sorte que nous pouvons également comparer des cas similaires de non-variant et ensuite comparer la charge virale. On peut voir toute une grande différence. J'ai presque l'impression que c'est une différence décuplée. Surtout si vous regardez dans les premiers échantillons, dans les échantillons diagnostiques initiaux, il y a apparemment des excrétions de virus plus élevées dans la variante 1.1.7 par rapport aux autres variants. Donc, que nous appelons simplement non-variante. Là, où la présence du variant typiquement anglais n'a pas été prouvée.
Hennig: Cela signifie qu'une charge virale significativement plus élevée aurait, pour ainsi dire, un effet plus important que celui observé dans cette étude dont nous avons discuté la semaine dernière.
Charge virale plus élevée chez le mutant
Drosten: L'étude de Harvard a également révélé une charge virale plus élevée à son sommet. Et ce que vous voyez également, c'est une augmentation plus lente de la charge virale avant que la charge virale maximale ne soit atteinte aux premiers stades de l'infection, ainsi qu'une baisse plus lente. Bien sûr, vous pouvez imaginer que si vous voulez aller plus haut, il faut plus de temps pour y arriver et il faut plus de temps pour redescendre. Comme en alpinisme. Mais l’explication est-elle vraiment aussi simple ? Je pense que nous devons encore attendre la version complète de cette étude de Harvard. C'était une pré-impression très préliminaire. Il y aura plus de données. À l'heure actuelle, tout est basé sur six ou sept patients. Et vous pouvez vous demandez ce qui resterait de l'effet si vous en soustrayez un ou deux. Il faut attendre.
Hennig: Cela signifie qu'il ne serait pas logique de discuter de périodes de quarantaine et d'isolement plus longues, par exemple, sur cette base. Ce n'est pas du tout sans importance pour les écoles. S'il y a une épidémie quelque part, une quarantaine plus longue peut être bonne pour limiter les épidémies en classe, mais bien sûr, c'est aussi beaucoup plus stressant. Cela pourrait également être contre-productif.
Drosten: Je ne connais aucune raison scientifique pour imposer une période de quarantaine plus longue simplement parce que ce virus 1.1.7 est présent. Je ne connais tout simplement aucune donnée qui le suggère. En dehors de cette étude de Harvard, qui est vraiment encore un gros point d'interrogation. Ce ne serait pas une raison suffisante pour moi de modifier la directive existante.
Hennig: Vous venez de mentionner des informations sur la neutralisation, y compris dans cette étude dont nous venons de parler de l'Imperial College. Cela signifie que la question est de savoir s'il y a une fuite immunitaire ici ? Alors, ce variant échappe-t-il à la réponse immunitaire après la vaccination ou survit-il à une infection ? Quelle est la leçon venue de Londres ?
Drosten: Ce que vous pouvez faire, c'est prendre des sérums de personnes qui se sont rétablies. Ensuite, vous pouvez comparer ces virus en laboratoire. Vous pouvez voir si les anticorps du sérum empêchent le virus d'infecter la culture cellulaire. Mais comment le faites-vous ? On peut observer que ceux qui ont eu une infection au printemps alors que le mutant n'existait même pas, neutralisent tout aussi bien ce virus B.1.1.7. Il n'y a en fait aucun signe reconnaissable, tout au plus un indice, mais ce n'est pas pertinent, qu'il protège contre ce virus. Fait intéressant, mais il faut également s'y attendre, ceux qui ont déjà eu une infection B.1.1.7 neutralisent bien sûr mieux le virus B.1.1.7. Eh bien, ils ont juste le même virus auquel ils se sont immunologiquement adaptés. Et puis, ce qui est très important, ceux qui ont été vaccinés neutralisent également bien le virus B.1.1.7.
Hennig: Cela signifie qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter concernant l'approvisionnement en vaccins même si le variant continue de prendre le dessus. Mais il y a aussi le variante sud-africain B.1.3.5.1, dont vous nous avez dit au début qu'il joue toujours un rôle limité en termes de chiffres. Mais en France, par exemple, il circule un peu plus. Donc peut-être encore une raison de le regarder. Et il y a maintenant une étude qui fournit un peu plus de connaissances que la base de données un peu mince que nous avions la dernière fois pour l’Afrique du Sud. Qu'en est-il de cet effet de neutralisation ? Existe-t-il un paysage immunitaire clair qui peut être prouvé ?
Variant sud-africain peu représenté
Drosten: Je commencer par deux choses. Tout d'abord, je voudrais vous donner les chiffres. À l'heure actuelle, nous avons environ la moitié des virus qui peuvent être détectés qui sont de type B.1.1.7, le variant anglais, et seulement environ un pour cent d'Afrique du Sud. Nous n'avons aucune raison de craindre que le variant sud-africain augmente autant que la variant anglais dans une population qui n'est pas immunisée. Si la population est immunisée, il ne fait aucun doute qu'il augmentera très fortement. Seule l'immunité nous protège contre l'infection ou contre une évolution sévère. C'est l'essentiel ici. Nous n'avons pas à nous soucier des variants pervers qui seraient plus répandus dans le futur. Ce sont plutôt les processus auxquels nous nous attendons normalement alors qu'un tel virus s'installe lentement dans la population. Ce sera un virus endémique. Mais ce sera aussi un virus du rhume endémique.
Hennig: Donc une chose semble sûre, ce sera avec nous en permanence.
Drosten: Très certainement. Et ce ne sera pas un virus du rhume parce que le virus lui-même deviendra plus inoffensif. Vous entendez parfois cela dans les débats publics. C'est une vision complètement fausse. Un virus ne devient pas plus inoffensif par lui-même. Un virus est plus susceptible de se propager tout seul. À savoir, il est sélectionné pour sa capacité à diffuser. Mais alors, au fur et à mesure de sa propagation, nous développons une protection immunitaire. Et dans le contexte de cette protection immunitaire, le virus semble alors totalement inoffensif car nous avons tous atteint notre première immunité à un moment donné - soit par la vaccination, soit par une infection initiale. Après cela, le même virus qui peut causer une infection la plus grave chez un patient immunologiquement naïf devient soudainement un virus du rhume inoffensif. C'est comme ça - vous devez garder cela à l’esprit- que pour l'écrasante majorité de tous les immunologiquement naïfs, il s'agit d'un virus inoffensif. On oublie toujours que le cours normal est une évolution relativement douce. Et que seuls certains des infectés ont une évolution sévère. Mais il y en a tellement dans une vague pandémique continue qu'on ne peut la tolérer.
Maintenant que nous l'avons répété, il y a encore une chose à préciser, à savoir qu’il y a eu beaucoup de messages alarmants dans les médias à propos du variant sud-africain. Sur la base d'un très petit document préliminaire dont nous avons également discuté il y a deux semaines. Il contenait également des données de test de neutralisation qui m'ont laissé un peu confus à l'époque car deux approches différentes du test ont été faites. Une fois avec le virus sauvage, avec le vrai virus, puis avec des pseudotypes. Vous y avez vu des résultats qui ne concordaient pas bien. Et dans de nombreux cas, vous avez constaté une perte totale de neutralisation. Cela a également été exprimé dans le document. J'ai trouvé qu'il aurait pu être écrit de manière moins dramatique. Et du fait qu'il s'agissait d'un vaccin très académique(note personnelle : le vaccin AstraZeneca, développé avec l’Université d’Oxford), où les scientifiques sont toujours à l’affut avec leur intérêt pour la publication, nous avons aussi ici des effets qui vont dans le même sens ... En science aussi, comme dans les médias traditionnels, les mauvaises nouvelles se vendent parfois mieux. On veut publier visiblement de telles nouvelles dans des revues scientifiques spectaculaires. Parfois, cela a comme effet que la toute première version d'un article scientifique semble assez dramatique.
Nous avons ici un autre article qui aborde la même question, avec une recherche très minutieuse. Nous ferions mieux de pouvoir donner des chiffres car, à mon avis, cela rend les choses plus fiables. Si l'on regarde les patients qui ont été infectés au printemps, qui n'auraient pas pu avoir de contact avec ce variant à l'époque, et si l'on compare un virus très précoce, comme celui qui existait également au printemps, et puis ce mutant d'évasion sud-africain, il y a une différence du facteur de puissance de neutralisation 13,3. Cette valeur numérique est donc appelée la valeur moyenne de la perte d'activité neutralisante.
Mesure in-vitro de l'échappement imunitaire du variant sud-africain
Hennig: Neutralisé 13 fois moins bien ?
Drosten: Oui, c'est cela. Mais il faut bien sûr être clair : au moment où j'entre en contact avec un virus, le titre augmente à nouveau, et même de cent ou mille fois.
Hennig: Le titre d'anticorps ?
Drosten: Oui, le titre d'anticorps. Lorsque je suis pré-immunisé et que je suis ensuite en contact avec un virus comme celui-ci. En fait, ce n'est pas le nombre, c'est en fait juste une lecture de laboratoire. Le nombre d'anticorps reste pratiquement le même. Mais la force de liaison des anticorps augmente. Nous parlons ici de maturation d'affinité. C'est ce que nous mesurons en fait comme titre. Maintenant, nous pouvonscfaire des comparaisons. Donc, si vous prenez des personnes contaminées au 1.1.7 convalescentes, et si vous regardez maintenant la différence en sens opposé, donc une vérification croisée, vous regardez à quel point ceux qui ont une infection 1.1.7 neutralisent-ils l'ancien virus. Là, la différence est de 3,1 fois. C’est un peu une zone de démarcation. Comment les variants de virus qui émergent lentement pour le moment se délimitent-ils réellement, et que nous pourrons peut-être plus tard classer comme sérotypes, mais qui pourront également disparaître à nouveau à un moment donné ? C'est le domaine du pouvoir neutralisant différent des anticorps. Donc, pour l'un une différence de 13,3 fois, pour l'autre d'une différence de 3,1 fois. Et surtout, qu'en est-il des vaccins ? On peut voir que pour les personnes vaccinées au BioNTech, une semaine après la deuxième dose, la réduction par rapport à ce virus d'échappement est de 7,6 fois, soit seulement environ la moitié de la perte de neutralisation d'une infection naturelle, une immunité naturelle. Et avec les personnes vaccinées par l’AstraZeneca, c'est neuf fois. Mais neuf fois à partir de 7,6 fois - vous ne pouvez plus vraiment faire la différence. C'est une réduction d'une ampleur similaire. C'est ainsi que vous l'interpréteriez, même après le vaccin AstraZeneca. Ce n'est pas un échec complet de cette vaccination ou un échec complet de l'immunisation par le vaccin AstraZeneca. Mais si vous le regardez à nouveau avec un look légèrement plus cool, c'est une réduction comme vous pouvez vous y attendre. Dans l'ensemble, ce n'est pas une bonne chose. Vous ne voudriez pas laisser ça comme cela à long terme. Mais il n'y a aucune raison de dire pour le moment que rien de tout cela ne fonctionne du tout.
Nouveaux variants à New York et en Californie
Hennig: Monsieur Drosten, il y a maintenant d'autres variants qui font les gros titres. Un baptisé B.1.5.2.6 sévit à New York et un autre en Californie. Êtes-vous préoccupé par ces variants ? Ou est-ce une trop grande attention des médias ?
Drosten: Pour le moment, c'est une attention médiatique excessive. Je dois vraiment redire, et peut-être que cela devrait également être une priorité dans les articles journalistiques, que la question est la suivante: comment gérer rapidement le vaccin que nous devrions recevoir en grande quantité après Pâques en Allemagne, l’administrer et renforcer l'immunité de la population ici ? Après avoir renforcé l'immunité de la population, nous verrons encore et encore des variants de virus. Il continuera à divertir et à occuper le monde professionnel. Mais les médias n'auront plus à en rendre compte, car alors nous n'aurons plus ce problème social majeur. Nous vivons ce problème social, c'est un problème qui affecte la société dans son ensemble, ce n'est pas seulement une question de protection individuelle, c'est aussi une question de protection civile et économique. Et puis de nouveau, en réfléchissant à la protection individuelle de ceux qui ne peuvent pas se protéger individuellement grâce à la vaccination ou qui ne comprennent tout simplement pas qu'ils devraient le faire mieux. Tout cela est inclus. Telle est la tâche de la société dans son ensemble à laquelle les politiciens doivent faire face.
Hennig: Enfin, je voudrais poser deux questions sur les vaccinations qui nous parviennent de plus en plus dans nos boîtes aux lettres de la part des auditeurs. Une inquiétude y est souvent exprimée. En ce qui concerne les vaccinations à l'ARN messager, nous avons expliqué pourquoi il peut pratiquement être exclu que la constitution génétique des cellules humaines soit modifiée par la vaccination. Désormais, les vaccins vectoriels fonctionnent différemment car un autre virus altéré et affaibli agit comme un véhicule pour l'information, c’est ce qu’on appelle le vecteur. C'est un adénovirus dans ce cas, un virus du nez qui coule. Il y a de l'ADN impliqué, pas de l'ARN, mais de l'ADN. On craint que l'ADN de cet adénovirus puisse être incorporé dans le génome des cellules humaines et qu'il puisse causer des dommages à long terme. D'un point de vue théorique. Cela peut-il vraiment être exclu ?Comment fonctionne un vaccin vectoriel ?
Drosten: Eh bien, en théorie, vous ne pouvez pas exclure cela. Bien sûr, c'est théorique. Tout d'abord, je dois dire que je ne suis pas du tout un expert de ce vaccin. Je dois me fier aux données que le monde professionnel a produites au cours de la longue expérience que l'on a avec ces vecteurs vaccinaux. Alors commençons par le début. Oui, c'est un virus. Ce virus pénètre dans la cellule. Dans son cycle normal de réplication, le génome du virus entre ensuite dans le noyau cellulaire sous forme d'ADN. Et dans le noyau cellulaire, une partie de la machinerie de réplication de la cellule est abusée par le virus. C'est un pirate de cellule.
Hennig: Donc, cela se passe comme dans le cas normal, lorsque vous êtes infecté par un adénovirus.
Drosten: Exactement s'il s'agit d'un véritable adénovirus pathogène. On parle de reprogrammer l'appareil de réplication cellulaire. Je pense que c'est un mot trop fort. La cellule entière n'est pas reprogrammée, mais quelques fonctions enzymatiques sont volées et mal utilisées. On sait bien comment cela fonctionne. Il y a des gènes qui sont copiés du virus au tout début de l’infection, qui sont nécessaires pour initier ce piratage. En principe, ils volent les activités enzymatiques de la cellule et les détournent vers le virus. C'est la première étape du piratage cellulaire. Ensuite, le virus sera radié. En fin de compte, les blocs de construction du virus sont créés, qui sont réassemblés dans la cellule et délestés à l’extérieur. Et la prochaine génération de virus est prête. Nous utilisons le mot réplication pour désigner le processus global, c'est-à-dire la multiplication du virus. Ce virus a été modifié il y a 30 ou 40 ans. En ce sens que ces premiers gènes du virus, qui donnaient le signal de départ du piratage cellulaire, ont été éliminés du virus. Ce n'est plus possible. On parle d'un gène E1 dans les vecteurs adénoviraux. Pas seulement spécifiquement pour ce vaccin, mais il existe toute une classe de vecteurs viraux qui ont été essayés pour les vaccins. C'est à ce moment que le premier gène régulateur a été retiré, et on se base sur 40 ans d'expérience.
Vous pouvez maintenant vérifier cela. Vous avez donc un virus qui ne peut pas se répliquer. Celui-ci se réplique dans certaines lignées cellulaires dans lesquelles ces gènes viraux sont à nouveau fermement intégrés et sur lesquelles un tel virus ne peut se reproduire que dans ces conditions. Un tel virus, tel qu'un virus vaccinal, ne peut pas du tout être reproduit en culture cellulaire normale. Il n'y a pas de progéniture car les gènes de contrôle initiaux essentiels sont déjà manquants. Si vous souhaitez produire un tel virus vaccinal pour la production de vaccins dans l'usine, vous devez utiliser une lignée cellulaire dans laquelle cette partie manquante du virus se trouve dans le chromosome. Ce sont des cellules très artificielles. Ce n'est que dans ces cellules - et de telles cellules n'existent pas dans le corps humain - que ce virus peut se multiplier. L'intégration du génome viral dans le génome cellulaire ne fait pas partie du cycle normal de réplication. Ce virus n'en a donc pas besoin comme le VIH. Le VIH a besoin d'intégration. Les adénovirus n'en ont pas besoin. Il n'y a aucune précaution que ces virus prennent pour s'intégrer. Si cela arrive, c'est un accident total. Eh bien, des accidents stupides se produisent dans la biologie cellulaire moléculaire. Et quelque chose comme ça peut arriver. Mais la condition de base est essentiellement qu'une réplication ait réellement lieu. Que le virus effectue toutes ces manipulations sur la cellule, y compris sa propre reproduction, pour ensuite conduire à cette stupide coïncidence d'intégration du génome. C’est extrêmement peu probable. Mais cela ne veut pas dire que je peux dire avec une certitude théorique absolue qu'il est impossible pour un adénovirus non réplicatif de s'intégrer dans le génome qui serait une coïncidence absolument rare. Seulement si vous réfléchissez maintenant : qu'arrivait-il à une telle cellule où le génome du virus est intégré dans le génome de la cellule ? Ensuite, il arrivera que certains des gènes viraux seront radiés sur une période beaucoup plus longue qu'avec la vaccination. Cela se produit par l'intégration elle-même, ainsi que par le gène étranger, l'antigène de vaccination, qui est radié. Cela conduit alors au fait que sur une longue période de temps cette seule cellule dans laquelle cela s'est produit représente une provocation complète pour le système immunitaire. Autrement dit, le système immunitaire éliminera très rapidement cette cellule dans laquelle cette stupide coïncidence s'est produite. Il y a donc toutes ces considérations fondamentales que l'on peut et que l’on doit faire.
Ensuite, vous devez aussi considérer le fait que ces vecteurs ont été essayés, et pas seulement sur des patients. Parfois, vous entendez des préoccupations du public en ce moment, comme quoi, il n'y a que 50 000 personnes vaccinées. Qui sait, peut-être que cela n'arrive qu'une fois sur un million environ. Cela n'a pas encore été observé. Mais il faut aussi dire qu'il existe aussi une homologation préclinique des vaccins. Cela signifie que ce vous ne commencez par sur des personnes, mais que cela commence par des cultures cellulaires. Bien entendu, ces événements d'intégration peuvent également être étudiés dans des cultures cellulaires. Cela a été fait pendant des décennies de recherche scientifique. Toutes ces données de base font alors également partie des demandes d'homologation. En tant que personne généralement éduquée sur le plan virologique, je ne peux que me retirer et dire : à partir de là, nous sommes dans le domaine de l'approbation des vaccins. Ici, je n'ai aucun aperçu des données de sécurité. Je peux seulement dire : ce n'est pas seulement une autorité de délivrance des licences, mais l'ensemble des autorités de délivrance des licences dans le monde entier qui s'occupent de tout cela depuis des années, et pas seulement depuis le SARS-2, ces vaccins sont utilisés depuis longtemps donc on en connaît les problèmes de sécurité sur un grand laps de temps. La connaissance d'ensemble des problèmes de sécurité, même rares, n'est nulle part ailleurs plus grande que dans l'approbation de vaccins. Il n'y a nulle part ailleurs plus de prudence. Je dois simplement me tenir à cela lorsque les gens me posent des questions sur ce genre de choses en public. Je ne peux pas dire que je peux juger cela. Mais il y avait tellement d'autres personnes beaucoup plus compétentes qui y ont travaillé avant moi et parallèlement à moi, et qui ont déjà noté tout cela. Et ils sont arrivés à la fin à affirmer que, vous pouvez le faire, vous pouvez le permettre. Et je ne peux qu’être d'accord avec leurs conclusions.
Hennig: Même si vous devez vous fier à des collègues sur cette question, j'ai une autre question dans laquelle vous devrez peut-être compter sur des collègues, mais vous pouvez toujours nous fournir un petit quelque chose parce que vous parlez plus à des collègues immunologistes que le profane. Il existe également un rapport porteur d'espoir sur un autre aspect de la vaccination, mais qui soulève également des interrogations, c’est le Long-Covid. Il y a quelques observations prudentes qu'une vaccination pourrait aider les personnes qui souffrent de Long-Covid, c'est-à-dire les conséquences d'une infection, depuis des mois. La vaccination, pour ainsi dire, comme thérapie. J'ai donc été infecté par le coronavirus il y a des mois et je ne peux pas me débarrasser des symptômes gravement débilitants, de l'épuisement extrême, de l'essoufflement, des maux de tête. Ensuite, je me fais vacciner et ces symptômes semblent s'améliorer ou même disparaître. Cela peut-il fonctionner immunologiquement ?
Effet de la vaccination avec Long-Covid
Drosten: Oui, cela peut fonctionner. Je suis désormais aussi informé que le lecteur des médias en général. Ce sont apparemment des anecdotes de patients qui rapportent cela, mais qui le rapportent de manière cohérente. Je peux bien imaginer qu'il y a quelque chose là-dedans. Il y a deux idées pour une grande partie de ces longs symptômes de Covid. L'un est la persistance directe du virus. Il est prouvé que le virus peut non seulement pénétrer dans les tissus du système nerveux central, mais aussi y rester plus longtemps que n'importe où ailleurs dans le corps. Qu'il y a des résidus viraux dormants qui se répliquent lentement. Cela, bien sûr, vous pouvez vous en débarrasser si vous donnez à nouveau un véritable coup de pouce au système immunitaire. Un autre coup de pied, pour que les lymphocytes T redeviennent réellement actifs et les anticorps, les cellules B, qu'elles produisent également correctement. Ce serait une façon de faire un dernier balayage du virus. L'autre variante se fait également par immunopathogenèse. Nous avons déjà discuté à plusieurs reprises de l'immunopathogenèse. C'est la réponse immunitaire elle-même qui nous rend malades. Ici aussi, vous pouvez maintenant travailler sur un tel effet immunopathogène, qui, soit dit en passant, peut également passer par les lymphocytes T, qui pourraient être maintenues en vie parce que quelque part dans le corps, disons dans la muqueuse intestinale, c'est juste une hypothèse, vous avez une excrétion plus longue dans l'intestin ... Chez l'enfant et l'adulte, nous savons maintenant très bien que la réplication du virus dans le tube digestif est plus longue qu'ailleurs dans le corps. Peut-être est-il vrai que chez certains patients, une partie du virus est dormante et provoque à nouveau le système immunitaire à plusieurs reprises et que de tels phénomènes immunopathogénétiques se prolongent plus longtemps que chez d'autres patients. Si vous vaccinez vraiment encore et encore,pour booster le système immunitaire, et que ce virus résiduel est alors complètement éliminé et que cette réaction immunitaire se calme petit à petit, alors les symptômes à long terme peuvent disparaitre également.
Hennig: Donc, un autre effet de la vaccination pourrait se produire qui ne peut pas encore être prouvé scientifiquement, mais qui a déjà été observé.
Drosten: Je suis tout à fait sûr que les cohortes de patients à long Covid qui existent seront examinées en ce qui concerne cet effet. Nous verrons bien sûr de bons essais cliniques. Malheureusement, ce ne sera pas en premier lieu en Allemagne. Car cette pandémie montre que la recherche clinique est particulièrement active en Angleterre, également aux USA, où beaucoup de fonds de recherche sont donnés en priorité aux universités qui disposent de ces patients.
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